Il est interdit de tomber malade a Madagascar
di P. Albert Rainiherinoro, MI *
La maladie ne fait pas acception de personnes. D’où le proverbe : « Personne ne voudrait pas être malade mais c’est la maladie qui l’oblige d’être ainsi. » Face à la maladie chaque personne réagit selon ses possibilités et sa propre conviction.
L’environnement et la culture dans laquelle elle se trouve y sont pour quelques choses. Evoquons quelques aspects de la situation sanitaire de la région Haute-Matsiatra, à Madagascar.
« La maladie se vend », dit-on souvent, justifiant ainsi le fait de porter à la connaissance d’autrui sa propre maladie afin qu’ils recherchent et proposent aussi une éventuelle médication. Le strict respect de la loi sur la protection de la vie privée est loin d’être effective à Madagascar.
Les animateurs de la Radio « Tsiry » - du Diocèse de Fianarantsoa - ne manquent jamais d’encourager les gens à se faire consulter chez les médecins mais toujours est-il que les auditeurs ne manquent pas d’entrer en direct pendant l’émission « Antsihitany » pour demander ou donner des conseils pour toutes sortes de maladies. Souvent, la dose des recettes proposée est approximative.
S’adresser à des guérisseurs ou des leaders religieux ayant des, soi-disant, pouvoirs miraculeux est aussi une pratique fréquente. Certains patients arrivent presque moribonds auprès de nos structures sanitaires car ils se sont faits d’abord traités à gauche et à droite.
Par rapport aux structures publiques les centres de santé de l’Eglise sont plus appréciés à cause de la qualité de service et d’accueil mais surtout de la participation moins chère ; d’où l’affluence des patients de la ville ou d’autres villages lointains. Mais nos structures aussi ont leurs limites. D’où l’obligation de référer certains cas aux structures publiques. Mais les patients n’y vont pas toujours volontiers.
On se demande alors : Cela est-il possible dans un pays où les ancêtres ont déjà affirmé la valeur et la sacralité de la vie : « Il est doux de vivre » ; « la vie est comme une bêche unique ; une fois coupée on ne peut plus la souder » ; « la santé c’est la première richesse » … ?
Pour confesser son impuissance l’homme Betsileo dirait : « Aucune eau voudrait ne pas finir son parcours jusqu’à l’océan mais c’est le destin qui l’amène à l’ordure ». Il ne peut pas donc faire autrement.
D’un bien, aussi bien individuel que collectif, la santé est devenue un grand luxe à cause de la paupérisation des gens. Telle pauvreté est très complexe. Or, à Madagascar l’accès aux soins n’est pas seulement payant mais aussi très cher par rapport au pouvoir d’achat. Dès lors qui n’a pas d’argents peut mourir simplement : à cause de la faim ou de la maladie ? On meurt quand même.
Evidemment, entre mourir aujourd’hui et demain c’est sûr que l’on va choisir le deuxième. Alors, entre aller chez le médecin ou se nourrir, l’esprit de survie donnera la priorité au manger. Comment ? Où ? Bonne chance à celui qui a le courage de s’y aventurier.
Il semble donc que la santé ne soit pas une priorité ni pour les gens ni pour les dirigeants qui ont diminué le fond prévu pour la santé dans la loi de finance de cette année. Mais force est de constater que ces derniers ne viennent même pas auprès des soi-disant « hôpitaux modernes » en cas de besoin mais vont directement à l’étranger.
L’insécurité régnante augmente malheureusement le nombre des personnes ayant besoins de soins. A cause de la distance entre les gens et les centres de santé opératifs, y arriver à temps relève d’un défi ; l’inexistence et le mauvais état du réseau routier n’arrange pas la situation. Mais même si on y arrive à temps, en particulier dans les structures publiques, on est loin d’être tranquille pour différentes raisons : mauvaise accueil, manque d’hygiène, corruption, …
Il arrive souvent que des patients déjà enregistrés disparaissent car ils sont dans l’impossibilité de supporter même le coût des premiers soins. Dans une des structures publiques, pour se faire consulter à l’urgence le patient doit acheter d’abord le dossier, les gants et, après la visite, les éventuels médicaments prescrits. Gare à qui n’y est pas habitué car la pharmacie est presque introuvable sans l’aide de quelqu’un. Pour y être hospitalisé, chaque patient doit se prémunir de draps pour avoir un minimum de commodité. Autrement, il dormira sur un lit découvert et sale. Même l’agent de nettoyage demande « le prix du savon liquide» en contrepartie de son service …
Grâce à l’Eglise beaucoup de volontaires viennent offrir leurs services bénévolement. Leur venue est vraiment providentielle pour les malades indigents qui n’auront presque jamais accès aux soins. Pendant leur présence les couloirs de nos structures sont pleins. Hélas, il n’est pas toujours possible de satisfaire toutes les requêtes. La réussite de ces missions exige beaucoup d’efforts de la part des différentes parties : Faire bien le bien n’est jamais facile.
Dans les structures publiques, bien qu’ils semblent des goûtes d’eau dans l’océan, existent quand même des agents de santé honnêtes. Il faut les repérer et se mettre en contact avec eux afin d’affronter ensemble autant que possible les différents défis. La création de la Commission Diocésaine de la Santé en est une forme de concrétisation. La dite Commission est en effet constituée par des représentants des agents de santé provenant aussi bien des structures ecclésiales que publiques et d’autres entités privés animés par leur foi et/ou leur bonne volonté.
Notre dernière réunion du 3 décembre 2016 a été un moment riche d’échanges et de soutiens réciproques. Durant laquelle on a insisté sur la nécessité de miser sur l’éducation des plus jeunes malgré le paysage très sombre du monde de la santé en mobilisant les membres de la commission à partir de la base.
A évaluer aussi est la proposition de créer une école infirmière catholique comme contribution de l’Eglise à la bonne formation des agents de santé. L’Eglise devrait se laisser interpellée par le nombre toujours croissant des écoles infirmières privées ; qui, bien que suppléant à l’insuffisance des agents de santé, ne correspondent pas souvent à l’exigence de qualité.
* nota sull'autore
Cappellano del villaggio Ilena (ex-lebbrosario), della clinica diocesana di Fianarantsoa, del Centro dell'educazione alla vita e all'amore (E.V.A), della Commissione Diocesana della Salute. Responsabile della formazione dei camilliani.